« Aujourd’hui, la détection de ravageurs lors des importations de plantes passe par un contrôle visuel qui demande des personnes très qualifiées, complété par des tests biologiques », amorce Stéphane Le Calvé, directeur de recherche au CNRS (1), avant de présenter ses recherches en cours : la mise au point d’un système de détection non invasif, rapide et facile d’utilisation pour des contrôles standardisés en douane, par exemple dans les conteneurs situés dans les zones portuaires. Stéphane Le Calvé participe de front à deux programmes de recherche européens sur ce sujet.
Communication des plantes
Lorsqu’une plante est attaquée par un insecte, elle va produire des composés organiques volatils (COV). Ils permettent, par exemple, de prévenir les autres plantes dans l’entourage proche de l’attaque en cours, afin qu’elles préparent des défenses.
Certains COV fonctionnent également comme des appels pour des insectes auxiliaires.
Des campagnes de mesure dans plusieurs pays européens ont été menées pour identifier les COV émis par les plantes en cas d’attaque, ainsi que ceux émis par les insectes eux-mêmes.
Au sein du projet européen PurPest (2023-2027), coordonné par Andrea Ficke (Norvège), les réactions à des attaques de nématode du pin, de la chenille légionnaire d’automne, ou encore de la punaise marbrée brune ont été étudiées, identifiant certains COV comme des traceurs de la présence de ces ravageurs.
Une partie du projet PurPest a aussi pour objectif de mettre au point un détecteur portatif (2) qui réalise des prélèvements d’air et les analyse dans la foulée. Des tests ont déjà été effectués dans des conditions contrôlées de plusieurs laboratoires européens.
Les analyses de ce premier prototype sont prometteuses mais mettent entre 30 minutes et une heure à afficher les résultats, pour un instrument de six kilogrammes environ.
Un détecteur testé en conditions réelles
Stéphane Le Calvé poursuit ces recherches en coordonnant un second programme européen, nommé sense-Apest (2025-2029). L’objectif est de développer un instrument plus rapide, le plus adapté possible aux conditions réelles, et de mettre au point un dispositif multi-détection (plusieurs systèmes de détection en parallèle), afin d’éviter tout faux positif.
L’intelligence artificielle et un algorithme vont aider à traiter les données automatiquement, « parce que 30 minutes à une heure, c’est trop long pour des contrôles officiels », explique le directeur de recherche, qui précise que « l’instrument multi-détection sera testé en conditions réelles en douane, dans le cadre du projet, par exemple au niveau de zones portuaires. Ceci permettra d’adapter l’instrument aux résultats obtenus ».
Il faudra ponctuellement toujours compléter par des vérifications visuelles, car le détecteur ne pourra pas forcément dire quel est le ravageur responsable de l’émission de COV par la plante, ou parce que la réponse du détecteur à la potentielle présence d’un ravageur pourra de temps en temps être « peut-être ».
D’après des estimations, cet instrument multi-détection portable ferait économiser entre 0,31 et 1,08 milliard d’euros par an à l’Union européenne en améliorant le processus d’inspection des plantes et en réduisant le risque d’une propagation de nuisibles.
(1) Institut de chimie et procédés pour l’énergie, l’environnement et la santé (ICPEES), Unité mixte de recherche du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), et de l’université de Strasbourg.
(2) Fabriqué par la société française Chromatotec, membre des consortiums des projets européens PurPest et senseApest, et chargée de la fabrication des instruments.
EXPERIMENTATION RECHERCHE
Expérimentation
2e APPEL À MANIFESTATION D’INTÉRÊT