« Tous les ans, nous avons investi en fonction de notre chiffre d'affaires, par petites tranches de 500 à 1 000 m² », introduit Alain Brichet, responsable de production des Établissements Brichet à Lannion (22). Avec son frère Daniel, responsable de la commercialisation et de la comptabilité, ils ont ainsi fait évoluer, dès 1987, l'entreprise familiale de production de plein champ vers une production hors-sol et sous abri. Leur dernier investissement consiste en deux déshumidificateurs mobiles, qui viennent compléter des équipements installés au fil du temps : motteuse, serres en verre chauffées avec écran thermique et ordinateur climatique, film technique Solatrol, lumière photosynthétique...

« Nous avons toujours adapté nos structures en fonction des plantes que nous voulions cultiver, avec un climat pour chaque plante », souligne Alain Brichet. C'est ainsi que l'exploitation se subdivise en petits tunnels non chauffés, en tunnels et multichapelles en plastique avec chauffage antigel et en serres en verre chauffées. Les structures légères sont couvertes de film technique Solatrol pour limiter la température en été, avec « une économie incroyable, malgré son coût et sa durée de vie limitée » (*), et de film transparent thermique en hiver. Pour les cultures sous serres, il faut surtout gérer l'humidité ambiante, responsable de maladies fongiques. Pour les éviter, la première action d'Alain Brichet a été de poser la toile hors-sol sur une bonne épaisseur de gravier pour permettre un drainage efficace. Autres pratiques préventives : le chauffage localisé au sol (20 °C) dans les serres destinées à l'enracinement des plantes (cuttings de géranium, Surfinia...) ; les basses températures, avec un chauffage aérien maintenant une température minimale de 10 °C dans les autres abris chauffés. Enfin, le producteur a recours au classique duo aération/chauffage, par temps sec. « L'idéal, c'est d'aérer régulièrement, car il est plus efficace de chauffer un air sec qu'un air humide. » Un nouvel outil permet au producteur de gérer au mieux l'humidité de ses serres : la Microdésu. « L'appareil fonctionne toute la nuit en automatique, et la journée quand le climat extérieur est trop humide pour aérer. »

La Microdésu est une petite pompe à chaleur air/air monobloc à déshumidification. Elle assèche l'air de l'abri par condensation de l'humidité ambiante sur sa batterie froide (voir schéma). En outre, elle récupère l'énergie de condensation de la vapeur d'eau pour la restituer à l'air déshumidifié : l'air soufflé par la machine est chaud et sec. La Microdésu offre ainsi une efficacité thermodynamique intéressante : 1 kW électrique fourni au compresseur restitue 5 kW de chaleur dans la serre, selon le concepteur et distributeur CMF Serres florentaises. La puissance électrique totale (Pac + ventilateur) est de 3,4 kW. « Plus il fait chaud et humide, plus la Pac pompe de l'eau ; s'il fait frais, la machine est moins efficace », explique Alain Brichet. Selon la fiche technique du concepteur, l'appareil évacue 6,6 litres d'eau/heure pour un air ambiant à 20 °C et 85 % d'humidité relative (HR) ; cette quantité passe à 3,2 l/h à 10 °C et 85 % d'HR. Côté maintenance, le producteur a juste à changer ou laver le filtre, régulièrement colmaté par les particules de terreau. Mais Alain Brichet ne s'en fait pas pour l'entretien : le fabricant sous-traitant ETT (Énergie transfert thermique) n'est pas très loin (Ploudalmézeau) !

Contrairement aux grosses installations de déshumidification, les Microdésu sur chariot mobile sont faciles à déplacer (1,50 m de long sur 90 cm de large et 50 cm de haut, pour environ 130 kg) et adaptées à de petits volumes. « La mobilité du produit permet de maximiser la durée de fonctionnement de la machine tout au long de la saison, en la positionnant à tout moment, dans le secteur de l'exploitation le plus “demandeur” », explique Benoît Mainguy, responsable commercial chez CMF sur la France. Alain Brichet utilise une unité pour 1 000 m² à 3 000 m² d'abri. Mais il est difficile de donner une surface type, précise Benoît Mainguy. « Microdésu est prévue pour traiter des volumes d'air humide et dépend, notamment, de l'évapotranspiration. En usage ornemental, la machine brasse 2 500 m3/h d'air à 18 °C à 80 % d'HR pour traiter un volume d'air. »

Pour le producteur, l'impact est flagrant sur les cultures et se concrétise par une diminution des maladies (botrytis sur fleurs, mildiou sur tomates), même si l'influence sur le climat de l'abri ne paraît pas toujours évident, notamment quand le temps est très humide. « Sur les pélargoniums arrosés par aspersion, le botrytis s'installait dès la floraison. Avec la déshumidification, nous ne réalisons plus de traitement fongicide. » Même si la Microdésu est équipée d'un dispositif de mesure de l'humidité, Alain Brichet préfère juger « à l'oeil » s'il faut déshumidifier : « L'objectif, c'est le bien-être de la plante ; on voit si elle se plaît ou non. Même si des attaques fongiques sont toujours possibles, la plante se porte mieux, elle résiste donc mieux. Et s'il faut traiter, le traitement sera d'autant plus efficace... »

« La Station technique d'expérimentation des plantes en pot (Stepp) teste l'appareil depuis 2011 », précise Alain Brichet, par ailleurs président de la station de Langueux. La station régionale du Comité d'action technique et économique (Cate) a essayé l'appareil sur Lisianthus en 2009. Pour cette culture, elle a constaté l'efficacité de la Microdésu pour diminuer l'hygrométrie de la serre et pour maintenir un bon état sanitaire des cultures malgré le confinement, tout en concluant sur la nécessité de trouver une « optimisation économique ».

Les frères Brichet ont acheté un appareil en 2010 pour environ 12 000 € HT à CMF Serres florentaises, sans aide financière. Actuellement, les déshumidificateurs font partie des investissements éligibles dans le cadre de la circulaire FranceAgriMer du 10 octobre 2011 (réf. AIDES/SAN/D 2011-47) relative à la mise en oeuvre du programme de financement de certaines dépenses de modernisation dans le secteur de l'horticulture ornementale (serres et aires de cultures hors-sol de plein air). Ils peuvent bénéficier d'une subvention de 30 % au titre de la « reconversion énergétique » ; un audit énergétique est obligatoire. Un nouvel appel à candidatures est ouvert depuis le 25 mai et jusqu'au 13 juillet 2012.

Les deux frères ont racheté deux nouveaux appareils en 2011, et revendu le premier à CMF, qui le prête désormais à la Stepp. Les nouveaux modèles « Basse température 2010 » se distinguent de la version standard précédente par leur capacité à déshumidifier sans givrage jusqu'à + 3 °C. En effet, dès que la température de l'abri descend à 8 °C, la Microdésu standard givre et se met en sécurité, tandis que le nouveau modèle évacue encore 3 l/h (à 85 % d'HR) et 2,2 l/h à 3 °C. « Nous pouvons désormais utiliser les déshumidificateurs en culture de tomate sous tunnel non chauffé », souligne Alain Brichet. Le producteur utilise les Microdésu de janvier à avril, puis de septembre à octobre (serres vides en novembre-décembre).

« En 2011, nous nous sommes rendu compte que la facture d'électricité avait doublé en deux ans », indique le producteur. « Elle était passée de 4 000 euros HT pour l'année 2009 (pas de Microdésu) à 8 000 euros pour 2011 avec les deux unités de déshumidification. J'utilisais les Microdésu dès que j'en avais besoin. Aujourd'hui, je programme les appareils en tenant compte des tarifs d'électricité. » L'abonnement EDF du producteur en option Tempo (qui n'est plus disponible à la souscription) lui permet de bénéficier d'un tarif « heures creuses » de 22 h à 6 h du matin et d'un tarif « heures pleines » les seize heures suivantes. Ces deux tarifs varient selon la « couleur » du jour : bleu, blanc et rouge, du moins cher au plus cher, avec 300 jours « bleus » et 43 jours « blancs » répartis dans l'année, et 22 jours « rouge » entre le 1er novembre et le 31 mars. En 2011, le tarif était par exemple d'environ 4 c€ HT en HC bleues, 8,2 c€ en HP blanches et 40 c€ en HP rouges. « Les machines fonctionnent systématiquement la nuit. Si j'ai besoin de les utiliser en journée et que nous sommes en jour rouge, je les branche sur notre groupe électrogène. »

En 2012, la différence n'est plus que de 25 % par rapport à 2009, avec une facture d'électricité s'élevant à 5 000 euros HT. Théoriquement, ce surcoût devrait être compensé par des économies d'énergie sur le chauffage. En effet, l'utilisation de la Microdésu permet de déshumidifier la serre sans avoir à l'ouvrir et perdre ainsi de précieuses calories. Mais le producteur, dont les serres sont chauffées au gaz de ville et au fioul, n'a pas dressé de bilan à ce niveau : « Les économies de chauffage sont difficiles à évaluer car les tarifs évoluent vite, et nous modifions également nos propres pratiques culturales afin de diminuer la facture énergétique. »

Valérie Vidril

(*) Voir « Le film technique améliore la qualité de mes plantes », le Lien horticole n° 800 du 16 mai 2012, pp. 8-9.

L'arrosage est effectué tôt le matin pour permettre le séchage des plantes par le soleil et éviter le développement de maladies. S'il fait humide, il est reporté quand c'est possible, et le déshumidificateur mobile permet d'assainir l'ambiance.

La sortie du déshumidificateur doit être orientée vers le haut pour éviter de « griller » les plantes avec l'air chaud et sec relâché.

La Microdésu permet de programmer la consigne d'hygrométrie. Elle est également équipée d'une horloge journalière de programmation des périodes de fonctionnement.